Écouter Nulle part & partout
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Titre
Créateur
Éditeur
Public visé
Description
Stage d’observation participante
Session 1
03/03/2023 18h30 à 21h
04/03/23 10h à 16h
Session 2
10/03/23 18h30 à 21h
11/03/23 10h à 16H
[PAUSE]
Session 3
24/03/23 18h30 - 21h
25/03/23 10h-16h
Session 4
31/03/23 18h30 – 21h
01/03/23 14h – 19h [représentation à 18h]
I. Les participants dans le processus de création.
Le groupe est composé de 9 participant·e·s : Paule, Kany, Miléna, Louanne, Colette, Juliette, Léo, Antoine et Anissa.
La participante la plus jeune est âgée de 20 ans et la plus ancienne de 60 ans.
Les profils :
Paule GEOFFRAY, 26 ans. Il s’agit de la nièce de Myriam Gourfink. Suite à une tumeur au cerveau, elle a interrompu ses études en médecine. Depuis, elle s’est installée à Crolles pour réaliser un CAP en pâtisserie. Elle participe seulement aux ateliers du samedi (besoin de repos). Paule apporte régulièrement des pâtisseries raffinées dégustées en collectif lors du café. Elle est active dans les retours en fin d’exercices. En dehors des répétitions, elle échange notamment sur des techniques de soin, selon les désagréments rencontrés par les participants. Dans les retours, elle décrit principalement ses sensations, ses difficultés physiques et s’attache à bien réaliser les exercices. Paule est souvent inquiète de ne pas réaliser correctement sa partition. C’est l’unique personne qui a formulé le besoin de changer de position physique dans la traversée (de la position assise à debout). Elle a pratiqué les danses de couple, et sa pratique artistique est d’ordre musical et plastique.
Kany SANDY, 31 ans. Elle habite à Saint-Martin-d’Hères et découvre le projet par le biais de son assistante sociale. D’origine guinéenne, Kany s’installe à Grenoble en septembre 2022 . Actuellement bénévole auprès de diverses associations de secours publics, sa situation administrative n’est pas évidente (de nombreux rendez-vous). Pour cause, elle manque un atelier et ne participe pas à la représentation finale. Déçue, elle demande plusieurs fois la possibilité de visionner la captation. Dans un premier temps, Kany est très réservée. Elle échange principalement avec Myriam Gourfink et très peu avec le groupe. Ce dernier ne va pas spécialement vers elle. Lors des premiers repas, elle se restaure sur une table à part. Puis elle se rapproche de Paule et moi même. Le rapprochement entre Paule et Kany s’est effectué autour de discussions culinaires, puis elles randonnent une fois en montagne. Pour ma part, sur la pratique de la danse, et des cultures africaines. Kany a vécu dans divers pays africains (Côte d’Ivoire, Cameroun, Guinée), elle est formée en hôtellerie. En répétition, elle est impliquée dans les exercices réalisés sans difficulté, mais inhibée pendant les échanges. Myriam Gourfink facilite l’expression de ses sensations au sein du groupe pleinement à l’écoute.
Lorsque je demande à Marion Françillon les coordonnées des participants (pour la réalisation des entretiens), Kany n’apparaît pas sur la liste.
Milena BURTON, (entre 20 et 25ans). Habite à Grenoble. Elle pratique la danse en tant qu’amatrice, et suit le cours all styles du Pacifique. D’emblée Miléna s’intéresse à mon rôle de stagiaire. Elle se renseigne sur mon parcours, et la formation Arts de la scène à l’UGA. En quête de formation, elle cherche à intensifier sa pratique et ses connaissances artistiques. Miléna suit quasiment la totalité des sessions. La première session est vécue avec difficulté. Miléna évoque des nausées causées par les exercices (ce n’est pas la seule). D’abord, elle doute de son engagement dans le projet. Elle marquera un arrêt à la deuxième session, et reprendra finalement le projet jusqu’au bout. Également soucieuse de bien faire, Miléna est impliquée dans les exercices et les retours. Toutefois, elle communique plus spontanément avec Carole Garriga que Myriam Gourfink. Elle invite sa bande d’amis à la représentation. Ses derniers participent de bon gré aux échanges de bord plateau.
Louanne BONGIRAUD, 20 ans. Habite à Grenoble, en service civique à l’accueil des artistes et du public au Pacifique. Louanne s’intéresse aussi à mon parcours. Elle me questionne sur ma formation initiale, la liaison possible entre le conservatoire et les études universitaires, le service civique en scène nationale, et les conditions de l’artiste en début d’insertion professionnelle. Lors de la première session, elle s’attache à accueillir les participants avec Marion Françillon. Elle prépare le catering et marque les présences. Marion Françillon étant absente lors de la deuxième session, Louanne se charge de l’accueil des participant·es. Elle le perçoit comme une charge supplémentaire qui ne facilite pas la détente dans les exercices. Louanne souhaite intégrer d’abord en tant que participante le projet (je note une légère frustration par rapport aux expériences précédentes d’accueil de projets). Toutefois elle est bien intégrée dans l’équipe du Pacifique et vivement engagée dans sa mission. C’est une attitude également repérable dans sa participation. Elle manque un atelier pour raison de santé. Dans le travail, elle participe volontiers aux échanges. Bien qu’elle soit familière de la danse, les premières sessions ne sont pas évidentes : fatigue, douleurs musculaires et nausées. La détente s’effectue dès la fin de la deuxième session.
Colette DURBIANO, 58 ans. Habite à Echirolles , travaille dans la comptabilité. C’est une amie de Juliette Delage, elles pratiquent la randonnée ensemble. Ces dernières fonctionnent en duo. Réservée et calme, Colette exprime une certaine rigueur. Elle pratique le yoga et Myriam Gourfink le repère dès la première séance. Elle indique à Colette que sa structure physique et son rapport au sol est solide. Sportive, les exercices semblent aisés. Elle formule le plaisir de la lenteur dans les retours en groupe.
Colette me semble plutôt éloignée du monde artistique, mais sa motivation à l’idée de participer à un projet avec un enjeu de représentation est perceptible. Elle ne l’énonce pas clairement au groupe, mais affirme ( discussions dans les vestiaires) chercher des pratiques nouvelles dans son quotidien. Elle a tendance à se détacher du groupe en marquant une différence d’age. Ainsi, elle échange principalement avec son amie Juliette et les artistes. Elle dit souvent « les jeunes », pour se référer au reste du groupe. Le yoga est perçu comme un moyen de conserver sa vitalité et sa beauté. « Ce yoga, c’est mieux qu’un lifting » dit-elle en blaguant à Myriam Gourfink. L’ouverture au reste du groupe advient entre la fin de la session 3 et la 4. L’intégration survient d’abord par une position maternante. Par exemple, le dialogue s’initie généralement en demandant l’âge du participant. Ou elle dispense des conseils lorsqu’un participant éprouve des désagréments physiques. La prise de conscience de cette attitude arrive après la représentation. Peut-être que le projet a permis de questionner son positionnement en matière de relation intergénérationnelle.
Juliette DELAGE, 60 ans. Habite à Grenoble, ancienne consultante, en reconversion d’accompagnatrice d’enfants porteurs d’autisme.
Juliette est également une adepte du yoga et randonneuse. De prime abord, elle partage la réserve de Colette. Par ailleurs, elles réalisent les exercices de binôme ensemble. Dès la deuxième session, Juliette s’ouvre au groupe, et dialogue plus aisément avec chaque participant. C’est un esprit joyeux et heureux de participer au projet. Également sportive, les exercices sont vivement appréciés et effectués aisément. Au fil des séances, Juliette s’intéresse au parcours de chacun·e. Dès la deuxième session, elle s’interroge sur le rôle de l’observation-participante et manifeste son intérêt pour les entretiens et ma posture. A la session 4, elle raconte (pendant les pauses) des expériences de spectatrices. Tout comme son amie, Juliette adhère au projet dès la première session. Les deux amies sont les premières à exprimer les bienfaits et la joie procurée par les exercices. Elle est assidue, et présente sur l’ensemble du projet. Avant la représentation, je masse les pieds de Juliette (dans le cadre des auto-formation en massages d’OASISH). Je découvre que Juliette est amputée d’un orteil. Elle raconte l’histoire de son accident, et je comprends que ce moment est un évènement de lâcher-prise pour elle-même. Elle en profite pour confier qu’elle a invité sa fille à la représentation, mais qu’elle ne viendra pas. Aussitôt sa déception formulée, il me semble qu’elle remet en question son point de vue, comme si elle pouvait finalement en profiter pour elle même. (N’ayant pas développé l’échange à ce sujet, il s’agit que de mon interprétation.) Colette assiste à ce moment, sans se faire masser. Après la représentation, Juliette propose de se revoir pour randonner.
Léo LAVILLE, 29 ans, hydrogéologue, en formation de maraîchage. Je le rencontre dans un contexte social, fraîchement installé à Grenoble, il cherchait des lieux et associations de danse. Amateur de danse contemporaine, il pratique notamment la danse libre et des cinq rythmes. Curieux, il participe à la première session et y trouve tout de suite de l’intérêt. Absent un week-end, il est cependant assidu. Les pratiques holistiques l’intéressent, il a voyagé et vécu un certain temps en Inde. Le yoga proposé par Myriam Gourfink l’intéresse vivement, notamment les expériences de voyages intérieurs que permet ce type de yoga. L’enregistrement des séances au microphone retient son attention, il manifeste plusieurs fois le souhait de recevoir les audios. Dans le groupe, Léo participe volontiers aux retours. Pour autant il est aussi dans sa « bulle ». Ainsi, il partage les repas en collectif, mais ne cherche pas spécialement à développer ou faciliter les relations interpersonnelles et collectives. Léo arrive pile à l’heure ou en retard aux ateliers et oublie le rendez-vous fixé pour l’entretien.
Antoine FRESNEDA, 24 ans, étudiant en première année aux Beaux Arts de Grenoble. D’abord réservé, c’est un esprit drôle et décalé qui se révèle sur le tard. Je perçois une curiosité profonde pour le projet. Antoine est éloigné des pratiques corporelles. Il raisonne beaucoup, et porte une attention particulière à la musique. Rapidement, il noue un dialogue avec Kapar T. Toepliez et Carole Garriga. Pendant les pauses, Antoine est volontiers à l’écart du groupe, afin de questionner et tester les instruments. Il bénéficie d’une attention particulière de Carole Garriga, qui l’accompagne dans ses gestes et sympathise avec lui. Antoine est assidu, il participe à la totalité du projet. Dans les échanges, il s’intéresse au fonctionnement de la structure, et des principes de la lenteur. Je note une détente nette lors de la dernière session. Antoine, jusqu’alors réservé avec le groupe, redouble de blagues.
L’évolution du groupe :
Lors de la session 1, 11 personnes sont présentes : 3 hommes et 8 femmes. Sur les 3 hommes, seul 1 quitte le projet. Les femmes du groupe final sont présentes dès la première session. À de rares exceptions près, la participation est assidue. Dans ce cas, les participant·e·s ne cumulent pas plus d’une ou deux absences aux ateliers. Elles sont justifiées par des rendez-vous administratifs/personnels ou des raisons de santé.
Le groupe se stabilise dès la fin de la session 2. Les départs sont justifiés par les motifs suivants : des lycéennes en période d’examen ; des difficultés musculaires (en particulier une participante atteinte d’une tumeur au dos) ; le rythme de la lenteur, qui manifeste des « pensées négatives » pour une participante en quête d’un projet collectif vivifiant et fédérateur (elle quitte le projet dès le samedi matin de la session 1.)
La première session est une étape physique à traverser. La plupart des participants expriment des sensations d’inconfort : nausées, et tensions musculaires principalement. Certains ont tendance à l’auto-hynose, voire à l’endormissement. De manière générale, les participantes qui s’intègrent aisément ont déjà une pratique affirmée du yoga (Colette, Juliette, Léo). Toutefois, malgré les premières tensions à dépasser, la plupart des participants expriment dès la session 1, le plaisir et la joie de la détente procurée par le yoga.
D’emblée je suis frappée par la qualité d’écoute des participant·es. J’estime que l’attitude, en somme la qualité de présence de Myriam Gourfink est fondamentale. La rencontre entre les participant·es s’effectue d’abord par la présentation des prénoms (en cercle), puis dans le travail en binôme (élaboration de la phrase gestuelle) et pendant les échanges autour des sensations physiques et émotionnelles (à l’issue des exercices). Enfin les discussions se développent en dehors des répétitions : essentiellement le samedi (pendant la pause repas) et dans les vestiaires. Il y a très peu d’agitation pendant les repas. Chacun apporte sa nourriture, ou profite de la pause pour se procurer un sandwich au supermarché du quartier. Dans un premier temps, je perçois une timidité dans le groupe. Les repas ont lieu sur les tables de l’îlot central du Pacifique. Plutôt que des discussions collectives, des petits groupes se forment et échangent un peu. L’ambiance n’est pas austère, mais j’estime que les états traversés en amont occasionnent des bouleversements internes. Nous parcourons des états de sensibilités certes collectifs, mais aussi personnels. Une sensibilité générale est donc palpable. Je note le volume sonore bas des échanges. Bienveillance et bonne humeur, concentration aussi, mais pas de franches rigolades.
Les artistes se restaurent avec le groupe, et partagent également les mêmes vestiaires. Les affinités au sein de groupe se développent par l’âge, ainsi les amies cinquantenaires forment un premier duo, qui échangent plus volontiers avec les artistes. Puis il y a Miléna et Louanne, aux profils analogues. Kany et Paule sont d’abord à l’écart du groupe. Kany est venue avec une amie qui n’a pas poursuivi le projet. Je perçois un écart lié à une inhibition culturelle. Progressivement, Léo et Antoine échangent avec l’ensemble du groupe, tout en restant dans leurs bulles.
L’attitude des participants sur la présence du micro : d’abord méfiance, puis demande de partager les enregistrements + demande à Myriam de produire des audios de yoga pour le grand public. A partir du 3eme atelier, on me questionne sur le rendu prévu, il y a une curiosité pour la démarche de l’observation-participation.
Myriam et Carole, note qu’il s’agit d’un groupe qui a su s’adapter facilement à la démarche. Il y a des qualités de lenteur chez chacun. Myriam en blaguant dit que « les montagnes agissent sur les grenoblois » certains ont répliqué que oui, la randonnée en montagne est une pratique méditative.
2. La posture des artistes.
Myriam GOURFINK est en position de leader. Un paradoxe intéressant : elle dirige l’ensemble du projet, mais il y a une grande liberté et confiance accordée aux participants. C’est une guidance libre. Myriam Gourfink explicite beaucoup sa démarche, elle guide chaque exercice, en somme elle garantit la structure de la partition. La notion de correction, de mouvements justes ou parfaits est inexistante.
Les réglages techniques sont préparé en amont des sessions. Ainsi, Myriam Gourfink établit à l’avance le programme de la session et la durée de chaque exercice. Ces derniers sont basés sur la composition musicale de Kaspar T.Toeplitz. La durée des traversées musicales augmente au fil de séances (selon les possibilités physiques des participant·es perçus par Myriam Gourfink). Par conséquent, la structure est envisagée comme un temps dédié à la perception corporelle. Les modalités de la participation sont de cultiver la présence à soi même et s’immerger entièrement dans sa perception physique.
Ses tâches principales :
*Inviter, transmettre/initier à sa pratique personnelle du yoga de l’énergie lié à sa recherche chorégraphique. Établir des énoncés clairs, enrichi par un vocabulaire anatomique et technique de haute précision.
*Conception de la partition et de l’évolution du programme chorégraphique. Inviter à une qualité de mouvement, fondre dans la lenteur, aller d’un point d’appui à l’autre. Relier : initier, évoluer, clôturer.
*Garantir la vue d’ensemble du projet. A partir de la session 3, elle rejoint le groupe en tant qu’interprète. Cela s’est effectué naturellement. Ce moment est intéressant, car il révèle un lâcher prise profond, une confiance entière dans la structure transmise aux participants. Les traversées sont effectuées en complète autonomie collective. Myriam Gourfink observe depuis sa position en hauteur, la partition collective tout en dansant. De manière générale, les retours sont toujours collectif, ils traitent de la qualité de la lenteur, ou de point technique : comment trouver la fluidité. Les retours sont des temps d’écoute et d’expression collective, sur lesquels Myriam Goutfink rebondit. Son attitude est encourageante et rassurante à l’endroit de la technique, jamais sur le personnel. Il est fort intéressant d’observer qu’elle pense, et investigue sur la recherche du ralenti par l’expérience collective. Elle ne délivre pas un savoir, mais s’appuie sur son expérience pour aiguiller les participants, tout en se nourrissant de l’expérience présente.
*Observation et lecture des états physique et émotionnel du groupe et de chacun. Elle cherche à adapter le yoga en fonction des besoins. Par exemple, l’exercice de la marche au ralenti (devenu un incontournable) est arrivé à la deuxième session afin d’atténuer les nausées. La marche est perçue comme un moyen de prise de contact avec le sol, pour affiner le sens de la gravité. Il est évident que Myriam Gourfink a une analyse fine et discrète des qualités et des lacunes physiques de chaque participant.
* NB : Le vocabulaire employé par les participant·e·s à l’égard de Myriam Gourfink est intéressant : magicienne, chaman, fée. Elle est rarement nommée en tant que chorégraphe.
Carole GARRIGA est présente sur l’ensemble des sessions. Lors de la première session, elle est présentée par Myriam Gourfink, indiquant qu’il s’agit d’une danseuse qui accompagne la compagnie depuis de nombreuses années. Carole agit en tant qu’assistante, tout en ayant sa propre expertise. Ainsi, elle prend en charge le travail des détails physiques et gestuels. Pendant la construction des phrases en binôme, elle observe chaque groupe, s’assurant que les consignes ont été bien comprises. Elle facilite la recherche des gestes. Tout comme Myriam, ses commentaires sont liés à l’élaboration des phrases gestuelles et aux techniques de mouvement. Si Myriam prend en charge le caractère général de la chorégraphie, elle délègue à Carole la tâche de la précision. Carole est en posture de soutien et de regard tantôt extérieur, tantôt intérieur.
Ses tâches principales :
* Faciliter la mise en route et le bon déroulement des exercices en binôme.
* Glisse dans l’oreille, ou en chuchotant des conseils techniques précis, par exemple : prendre le temps du toucher, de délier, de faire la jonction.
* Effectue le rôle du binôme lorsqu’un participant est absent, afin de lui permettre de créer une nouvelle phrase.
* Lorsqu’un participant évoque un blocage, elle cherche à trouver une solution de fluidité du mouvement.
*Observation générale des exercices. Déceler, les besoins.
* Effectue des allers-retours entre l’intérieur et l’extérieur du groupe. Elle intègre pleinement la partition à partir de la session 3.
* Echange spontanément dans les temps de retour, et en individuel avec Myriam.
A noter : Carole est méfiante avec le microphone.
Kaspar T.TOEPLIZ est également présent dès le début. La complicité et l’amitié sont également évidentes. La musique est une part fondamentale de ce travail. Lors de la session 1, il se présente en tant que musicien et compositeur, sans entrer dans les détails. Dans le travail, il est à l’écoute des exercices de Myriam. Il improvise et compose au fil des séances. A la fin de la session deux la composition me semble être terminée. Session 3, il présente ses instruments et son travail musical lors d’une discussion approfondie (environ 1h). Les participants peuvent tester les instruments. En répétition il n’effectue aucun retour sur la danse. Les échanges adviennent s’il s’agit de questionner les temps et repères musicaux dans les traversées. Pendant les pauses, Kaspar est accessible, il répond facilement aux questions. Il invite volontiers les participants à tester les gongs.
Ses tâches principales :
* Improviser des traversées à chaque exercice.
* Conception de la partition sonore au fil des séances.
* Garantir la durée de la traversée par la musique.
Le 1er avril, une documentariste filme la générale, tout en restant à l’écart du groupe. Chargé de production de la cie, Matthieu Bajolet assiste également à la générale. C’est le premier spectateur. Il effectue des retours à Myriam, qu’elle partage avant la représentation, sans spécialement le citer. Myriam Gourfink: « il m’a été dit de vous conseiller de moins regarder le sol ». Matthieu Bajolet est enthousiaste et curieux de rencontrer et échanger avec les participant·e·s, notamment pendant le pot. Il porte un intérêt vif pour le microphone, et encourage les participants à échanger sur l’expérience, tout à fait conscient de la présence du dispositif d’écoute.
3. La collaboration entre les artistes.
La complicité, l’amitié et la fidélité du trio sont évidentes. J’ai noté la présence des artistes en journée le 03/03 (pendant que nous réalisions le repas-discussion avec Ivana Müller). A posteriori, il semble intéressant de les questionner sur le contenu de cet journée à trois. Ont-ils médité ? Échangé sur le processus ? De manière générale, la collaboration est très fluide. D’une part parce que le trio se connaît parfaitement, d’autres part j’estime que la structure de la session est établie à l’avance. Elle est intuitive et répétitive : échauffement, échanges, création de phrase, traversées. Les tâches et rôles de chaque artiste sont bien déterminés. La réalisation est portée par Myriam Gourfink, et Carole Garriga et Kaspar T. Toeplitz s’adaptent en temps réel. La collaboration est placée sous le signe d’une indépendance complémentaire, guidé par une confiance mutuelle.
Kaspar T. Toeplizt est entièrement autonome dans sa création musicale. Myriam Gourfink et Carole Garriga n’interviennent pas dans ce domaine, sauf pour établir le durée de la musique, puisque cette dernière indique le temps de la traversée.
NB : La nervosité due aux problèmes de transport liée au mouvement de grève contre la réforme des retraites. Elle est tout à fait contenue, mais visible dans les temps de pause (annulation de train, recherche de covoiturage, échange de solutions avec les participants).
4./ Le traitement de l’œuvre.
Myriam Gourfink emploie le terme « pièce ». Cette dernière est surtout évoquée comme un temps de représentation et d’ouverture au public. Ce rendez-vous est abordé en début de session 1, lors de la présentation générale du projet. Myriam Gourfink se réfère régulièrement aux expériences antérieures (Roubaix, Paris), lorsqu’il s’agit de répondre à des questions précises. Elle s’appuie sur ce qui a été observé et vécu par les anciens participants, sans en faire un modèle à suivre. À aucun moment n’apparaît la dimension de répétition pour le public. Le cœur de ce projet, c’est le processus de la traversée au ralenti. Chaque expérience de traversée est unique et Myriam Gourfink place le curseur précisément à cet endroit. Les traversées sont l’opportunité d’éprouver pour soi, un voyage vers l’amplitude, permettant à chaque répétition d’aller plus loin, de découvrir de nouvelle sensation et de délier ses mouvements. C’est un projet qui agit sur le non-évènement, le spectaculaire n’est aucunement recherché. Ce qui permet aux participant·e·s d’évacuer tout enjeux de réussite. Il s’agit d’un cadeau fait entièrement à soi, tout en étant relié au groupe. Car l’unique réglage chorégraphique travaillé, et celui du touché entre les partenaires voisins. Ainsi nous avons appris à déceler les repères musicaux qui déterminent le temps des touchers dans la pièce. Ce moment est relativement long (15min), alors la liberté de réalisation est garantie. Par ailleurs, la notion d’erreur est inexistante. Il intéressant de constater qu’à partir de la session 4, certains participant·e·s s’octroient naturellement la possibilité de modifier des mouvements, d’en ajouter, simplifier ou transformer des éléments de leurs propres structures. Cela advient parce que la structure de base est suffisamment solide pour le permettre. C’est aussi l’état d’esprit du projet : aller vers des mouvements naturels et fluides. L’autonomie de chacun permet donc l’auto-analyse et l’auto-correction dans le processus. C’est à cet endroit que je perçois le caractère « magique » de la guidance de Myriam, perçue par les participant·e·s. La structure chorégraphique proposée et les outils de yoga travaillés avec application fournissent un ancrage fort, permettant aux participants de trouver des ressources créatives internes. En quelque sorte, on peut dire que Myriam Gourfink ouvre et balise un chemin certain, que les participants suivent par eux même, à leurs propres rythmes. La musique live permet un lâcher-prise profond.
Les 3 premières sessions ont lieu dans le petit studio, la représentation dans le grand studio n’est pas spécialement évoquée. L’installation dans le grand studio a nécessité une adaptation au changement d’espace : lumière, taille et ambiance de la salle. Pour ce faire, les rituels du petit studio de création sont répliqués : installations des tapis de yoga et des plaids, retrouvailles des gradins. Dans cette phase, Myriam Gourfink est encore plus attentive aux durées. Elle fait en sorte que chaque temps dans le grand studio soit dédié, à un exercice pratique : le yoga, les traversées et quelques échanges. Ce cadrage est un moyen d’éviter la dispersion, il favorise la concentration nécessaire à la lenteur. Il s’agit aussi d’affronter efficacement les données réelles du lieu. Les questions principales étant, où placer son regard face aux lumières et comment considérer le présence du public. Myriam donne pour conseil de conserver la fluidité des regards. Ainsi, le public peut être regardé dans les yeux, le temps d’un échange non appuyé. En cas de difficulté, elle conseille d’observer le front ou la trachée du spectateur, technique empruntée aux arts martiaux. En somme, le traitement principal de l’œuvre, c’est sa dissolution dans le processus, ce dernier se régénérant à chaque traversée, à chaque dépôt d’expérience.
5. La posture du Pacifique.
Conditions techniques :
Un catering est toujours présent : boissons chaudes, fruits et gâteaux.
La scénographie (les gradins) sont mis à disposition à partir de la session 3.
Nous travaillons dans le petit studio de la session 1 à 3, et découvrons le grand studio lors de la session 4.
Le projet est accueilli par Marion Françillon. Lors de la session 1, elle accueille le public en cochant les présents. Le premier soir, elle garde les enfants d’une participante (coloriage, jeux). De manière générale, Marion Françillon reste à l’écart du groupe, tout en étant à l’écoute des besoins éventuels. Elle participe une fois à un échauffement de yoga, et assure la technique pour la représentation (diminuer les lumières à la fin de la traversée). Elle introduit et clôture l’échange bord plateau. Marion Françillon conserve une certaine réserve avec le groupe, elle échange plus volontiers avec les artistes et des personnes identifiées : Louanne et moi-même. J’estime que l’écart de Marion avec le groupe est le fruit de l’autonomie des participant·e·s. Il y a une forme de concentration entière pendant les répétitions, en dehors de ce temps, les participant·es se reposent, ou font des petites pauses à l’extérieur de Pacifique. Il n’y a pas nécessité d’échanger ou de développer une activité nécessitant l’appui spécifique de Marion Françillon.
6. Ma posture de stagiaire.
Dès le début de session 1, je me présente et j’introduis la posture de stagiaire. J’explique que je serai amenée à prendre des notes et que j’enregistrerai chaque session, à l’aide du micro zoom que je montre. La première réaction du groupe et de Carole Garriga, est une forme de méfiance à l’égard de ma position et particulièrement du microphone. Confiante et joviale, Myriam Gourfink est intéressée par la démarche. Kaspar T. Toeplizt est indifférent. A la session 3, lorsque les participant·e·s manifestent le souhait de pérenniser les exercices de yoga dans leur quotidien, Myriam Gourfink m’incite à transmettre les audios aux participant·e·s. Certain·e avaient déjà manifesté individuellement leur souhait. L’envoi a été réalisé, la moitié du groupe à téléchargé les archives sonores. Marion Françillon également.
Dès la session 1, je comprends que les allers-retours entre les prises de notes, et la participation aux exercices n’est pas appropriée. Je choisis de m’appuyer sur le microphone, ainsi j’enregistre les séances dans leur totalité. De cette façon, je participe entièrement aux exercices, car l’entre-deux est tout simplement impossible. Les exercices requièrent une présence pleine et engagée. De plus, l’effort physique est intense. Tout comme les participant·es, j’éprouve le besoin de calme et de repos pendant les pauses. Je choisis d’éteindre le microphone pendant les pauses, afin de ne pas envahir le groupe durant ces temps de repos sensibles. La prise de note s’effectue de retour chez moi, avec l’enregistrement de la session en fond sonore. Le microphone est un soutien essentiel. Ainsi, la posture de stagiaire agit également par la dissolution dans le processus. C’est en intégrant entièrement le projet par la pratique aux mêmes titres que chaque participants que, d’une part, je trouve le moyen d’analyser le dépôt de l’expérience et d’autre part, d’échanger et de nouer progressivement des liens amicaux avec pendant les pauses.
Évènement notable à titre personnel, ce projet m’a permis de prendre conscience d’un conditionnement lié à ma formation initiale. Issue du conservatoire et d’école d’art, j’ai réalisé une tendance à me charger d’un horizon d’attente et de réussite en amont d’un workshop. Notamment parce que la formation professionnelle place souvent les artistes dans un système compétitif, et que la formation m’a précisément appris à être efficace et rapide.Spontanément, je commence un workshop en déterminant des points techniques à atteindre ou apprendre, et j’éprouve une exigence dans le travail à fournir, afin de nourrir une relation de travail approfondie avec l’artiste intervenant. Dans ce cas, s’ajoute ma position de stagiaire qui nécessite d’observer le processus, l’archiver, et élaborer des questionnements en temps réel. En parallèle, je présentais le concours de la Fai-AR. Ce mois de mars m’a donc demandé de jongler précisément avec cette dualité, une grande efficacité d’exécution dans une épreuve professionnelle, et une immersion entière dans l’intensité douce de la lenteur, auprès de participant·es éloigné·es du monde artistique professionnel. Ainsi ce workshop a été une expérience très constructive, dans le sens où elle m’a permis d’expérimenter un ralentissement profond au sein de la course, et de m’initier aux qualités de la lenteur qui irriguent mes propres recherches artistiques.